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Question
:
Un accord d'entreprise peut-il modifier un contrat de
travail ?
La loi Aubry du 13 juin 1998 sur les 35 heures relance
l'intérêt de cette
question concernant notamment les rémunérations.
Désirant anticiper la date de l'obligation légale de
passage aux 35 heures,
une société décide de conclure dès aujourd'hui avec
les syndicats un "
accord Aubry " pour bénéficier des aides prévues
par la loi. Cet accord
prévoit une baisse de la durée du travail de 10 % (
passage de 39 à 35
heures ). Il prévoit également une baisse générale
des salaires limitée à 4
% contrairement à une baisse de 10 % que la direction
souhaitait voir
appliquer initialement en rapport avec la baisse de la
durée du travail.
Les salariés pris individuellement ont-ils leur mot à
dire ? En effet, tout le
monde n'est pas forcément d'accord de voir son salaire
baisser même s'il
est prévu de travailler moins.
Réponse :
La réponse est donnée par un arrêt de la Chambre
sociale de la Cour de
cassation en date du 25 février 1998 ( Qaissi contre SA
CGBI, arrêt n° 991
P ). Dans cette affaire, un accord avait été signé
entre la direction et les
délégués du personnel. Il importe peu ici de
détailler le contenu de
l'accord. En revanche, l'arrêt précité fait clairement
ressortir deux
évidences :
A propos, tout d'abord, de la valeur juridique
d'un tel accord,
rappelons que l'article L 132-2 du Code du travail
prévoit que, du côté
des salariés, seuls les syndicats représentatifs
peuvent signer un
accord collectif d'entreprise. Cette signature
peut être apposée soit
par le délégué syndical soit par un salarié
mandaté par un syndicat
dans les conditions expressément prévues par la
loi Aubry. La Cour
de cassation rappelle cette disposition légale en
précisant, dans les
attendus de son arrêt, que " l'accord
intervenu entre l'employeur et
les délégués du personnel était dépourvu de
toute valeur en tant
qu'accord collectif ". La réponse est
claire.
Ce genre d'accord atypique signé entre la
direction et les délégués du
personnel ne peut évidemment pas s'appliquer aux
salariés. Mais
qu'en est-il concernant un véritable accord
collectif d'entreprise
signé avec un ou plusieurs syndicats présents
dans l'entreprise ? La
Cour de cassation y répond de manière tout à
fait limpide : " En toute
hypothèse, un accord collectif ne peut modifier
le contrat de travail ".
Si on reprend l'exemple évoqué plus haut, cela
signifie en clair que si
un salarié n'est pas d'accord avec la baisse de 4
% de son salaire, ce
n'est pas l'accord d'entreprise qui pourra la lui
imposer. Il s'agit d'une
modification importante de son contrat de travail.
L'employeur devra
donc obtenir, pour chaque salarié concerné, un
accord individuel
matérialisé par un avenant à son contrat de
travail.
Retenons donc qu'un accord d'entreprise, même s'il est
signé
unanimement par tous les syndicats, ne peut imposer à un
salarié pris
individuellement une modification importante de son
contrat de travail.
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